Au travers de ces quelques lignes, nous avons souhaité vous présenter une page méconnue de l’histoire, le rôle prépondérant joué par les normands dans le sud de l’Italie et en Sicile aux XIème et XIIème siècles.
Une fratrie à la conquête de l’Italie
Au début du XIème siècle, Tancrède de Hauteville, seigneur de Hauteville la-Guichard près de Coutances dans la Manche compte au moins douze fils. Si l’ainé a un avenir « tout tracé », il hérite du patrimoine de son père, les cadets de ce petit seigneur normand se doivent d’aller chercher titres et fortune loin de leur terre natale.
C’est dans l’Italie divisée entre l’empire Byzantin, la papauté et l’empire germanique que vers 1035 la fratrie va se rendre, proposant leurs services en tant que mercenaires. En l’espace de quelques années, grâce à leurs capacités au combat, leur efficacité comme chef de guerre, mais aussi par le jeu de mariages et d’alliances, ils acquerront leurs propres titres de noblesse.
L’un d’eux, Robert Guiscard arrivé en Italie vers 1047 va rapidement devenir l’un des plus grands seigneurs normands du sud de l’Italie.
Le benjamin des douze fils,Roger de Hauteville part pour l’Italie vers l’an 1056. En 1058, après avoir maté les révoltes en Calabre pour le compte son frère ainé Robert Guiscard, il s’installe dans le château de Scelea.
Les deux frères vont alors s’allier dans un projet commun : la conquête de la Sicile.
la conquête de la Sicile
Au milieu du XIème siècle, la Sicile est sous domination musulmane. Mais elle est divisée, 4 émirs se disputent la suprématie sur cette ile.
En 1061, l’un d’eux, Ibn-al-Timnah demande à Roger de l’aider à combattre ses rivaux. Roger s’empare alors de Messine dont le port permettra alors aux deux frères d’acheminer renforts et ravitaillement. Quelques mois plus tard, Roger remporte une victoire importante à Enna, la dynamique victorieuse normande est engagée. Les historiens considèrent que la conquête de la Sicile s’achève en janvier 1072 par la prise de Palerme, même si quelques territoires sont encore contrôlés par les musulmans.
Suite à la prise de Palerme, Robert investit alors officiellement Roger comme Comte de Sicile sous son autorité en tant que Duc des Pouilles, de Calabre et de Sicile.
Dans les années qui suivirent la prise de Palerme, Roger va mener une politique complaisante à l’égard des territoires sous domination musulmane à condition qu’ils se soumettent volontairement. Il étendra ainsi son autorité sur la quasi-totalité de la Sicile. Les derniers bastions de résistance seront soumis par la force en 1085 pour Syracuse et 1090 pour Noto.
Roger 1er Comte de Sicile : une politique avisée et efficace
Roger et ses compagnons normands arrivent en Sicile en tant qu’élite dirigeante. La population quant à elle est composée de nombreuses cultures et confessions : des musulmans, des grecs de culture orthodoxe byzantine, des juifs, des catholiques lombards… Grâce à une politique avisée, permettant à chaque culture et religion de s’exercer, mais aussi en concluant des accords économiques judicieux et en veillant à limiter les pouvoirs des seigneurs, Roger réussit à centraliser l’autorité sans provoquer d’animosité excessive à son encontre.
Sous la gouvernance de Roger, la Sicile devient au début du XIIème siècle un état stable et prospère où cohabitent pacifiquement une multitude de confessions, langues et peuples.
Roger est désormais un seigneur riche et influent, respecté dans son propre comté mais aussi un noble parmi les plus puissants du continent européen, respecté et courtisé par les plus grands d’Europe.
Roger II roi de Sicile
Roger 1er de Sicile meurt en 1101, son fils ainé Simon âgé alors de 8 ans devient Comte de Sicile. Mais, en 1105 Simon s’éteint à son tour, Roger hérite alors du titre de son père. Toutefois en raison du jeune âge des comtes, leur mère Adélaïde de Montferrat assurera la régence jusqu’en 1113.
A partir de 1113, comme son père, Roger II mène une politique habile, nuancée et ambitieuse, basée sur le commerce et s’appuyant sur des conseillers de toutes confessions et origines. La tolérance dont le Comte Roger fait preuve à l’égard des autres confessions et notamment de l’islam le met à l’écart des conflits religieux en terre sainte, lui permettant ainsi de développer le commerce avec l’ensemble du monde méditerranéen.
En 1127, le dernier petit fils de Robert Guiscard meurt sans descendance, Roger II obtient le titre de Duc des Pouilles. Tous les états normands fondés par les fils de Tancrède de Hauteville sont alors réunis sous l’autorité de Roger II.
Le 27 septembre 1130, une bulle pontificale concède à Roger II le royaume de Sicile, de Calabre et d’Apulie. Le 25 décembre 1130, Roger II est officiellement couronné roi de Sicile dans la cathédrale de Palerme.
Roger II meurt en 1154, son corps est déposé dans la cathédrale de Palerme. Son fils issu du mariage avec Elvire de Castille devient alors Guillaume 1er roi de Sicile de 1154 à 1166.
L’héritage normand
La présence normande en Sicile apportera la prospérité économique et laissera un patrimoine culturel riche et diversifié imbriquant les cultures normandes, arabes et byzantines. La chapelle palatine à Palerme est un bon exemple de ce style multiculturel.
Pour en savoir plus sur la vie des Hauteville, vous pouvez visiter le musée Tancrède à Hauteville-la-Guichard : https://www.normandie-tourisme.fr/sites-lieux-de-visites/musee-tancrede/